Vendredi 2 Septembre 2011 : Moulin des Baronnies  >  Bagnères de Bigorre -  22 km


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Alchimie du verbe (Délires II  -  Suite)


La vieillerie poétique avait une bonne part dans mon alchimie du verbe.
Je m'habituai à l'hallucination simple : 
je voyais très franchement une mosquée à la place d'une usine,
une école de tambours faite par des anges, des calèches sur les routes du ciel,
un salon au fond d'un lac ; les monstres, les mystères ;
un titre de vaudeville dressait des épouvantes devant moi.
Puis j'expliquai mes sophismes magiques avec l'hallucination des mots !
Je finis par trouver sacré le désordre de mon esprit.
J'étais oisif, en proie à une lourde fièvre :
J'enviais la félicité des bêtes, - les chenilles, qui représentent l'innocence des limbes,
les taupes, le sommeil de la virginité!
Mon caractère s'aigrissait.
Je disais adieu au monde dans d'espèces de romances :


Arthur Rimbaud  -  Une saison en enfer (1873)





Il a plu pendant la nuit et la nature apparaît comme mystérieuse à travers le brouillard.
Des petits chemins me conduisent à
Bourg de Bigorre, et ensuite traversée de forêts
par des sentiers boueux jusqu'à Bonnemazon et Escaladieu.



Le Château de Mauvezin








L'abbaye de l'Escaladieu
Je ne la verrais que de l'extérieur, car à l'heure de mon passage, elle était fermée.


 


Les passages en forêt se suivent avec de beaux jeux de lumière...


Après le village de Durban, le GR est mal balisé, ou alors c'est moi qui perdu dans mes rêveries me suis mal orienté...
Conséquence, je tourne un peu en rond au milieu de cette forêt, à travers chemins boueux et fougères.
Je finis tant bien que mal par atterrir dans un petit village :
Argelès-Bagnères qui se trouve être un peu à l'écart du Chemin.



 


Alchimie du verbe (Délires II  -  Suite)

CHANSON DE LA PLUS HAUTE TOUR

Qu'il vienne, qu'il vienne,
Le temps dont on s'éprenne.

J'ai tant fait patience
Qu'a jamais j'oublie.
Craintes et souffrances
Aux cieux sont parties.
Et la soif malsaine
Obscurcit mes veines.

Qu'il vienne, qu'il vienne,
Le temps dont on s'éprenne.

Telle la prairie
À l'oubli livrée,
Grandie, et fleurie
D'encens et d'ivraies,
Au bourdon farouche
Des sales mouches.

Qu'il vienne, qu'il vienne,
Le temps dont on s'éprenne.


Arthur Rimbaud (Une saison en enfer)
 







Après avoir demandé mon chemin, je suis une petite route en montée qui me conduit au village d'Uzer.
Je ne serais donc pas passé à Castillon comme prévu sur mon itinéraire...

     



A partir d'Uzer, il y a une petite route qui grimpe tranquillement jusqu'au col des Palomières.
Nous sommes au cœur de la
Bigorre qui offre un beau panorama.








Après cette montée jusqu'au col sous une bonne chaleur, je me laisse tenter
par ce petit restaurant où me sera servi un bon déjeuner ! 



J'arrive en vue de
Bagnères de Bigorre.


 
La Cathédrale de Bagnères-de-Bigorre

 

Hébergement à la Halte Saint-Jacques - Accueil Notre-Dame
 24 Rue Gambetta - Bagnères de Bigorre  -  
(Tél. 05.62.91.16.39)  
Bon accueil par André Abadie

4 Coquilles

 


 Alchimie du verbe (Délires II  -  Suite et Fin)


Enfin, ô bonheur, ô raison, j'écartais du ciel l'azur, qui est du noir,
et je vécus, étincelle d'or de la lumière nature.
De joie, je prenais une expression bouffonne et égarée au possible :

Elle est retrouvée !
Quoi ? - L'éternité.
C'est la mer mêlée
Au soleil.

Mon âme éternelle,
Observe ton voeu
Malgré la nuit seule
Et le jour en feu.

Donc tu te dégages
Des humains suffrages,
Des communs élans !
Tu voles selon...

- Jamais l'espérance,
Pas d'orietur.
Science et patience,
Le supplice est sûr.

Plus de lendemain,
Braises de satin,
Votre ardeur
Est le devoir.

Elle est retrouvée !
- Quoi ? - L'Éternité.
C'est la mer mêlée
Au soleil.

¯¯¯¯¯¯¯¯

Je devins un opéra fabuleux : je vis que tous les êtres ont une fatalité de bonheur :
l'action n'est pas la vie, mais une façon de gâcher quelque force, un énervement.
La morale est la faiblesse de la cervelle.

À chaque être, plusieurs autres vies me semblaient dues.
Ce monsieur ne sait ce qu'il fait : il est un ange. Cette famille est une nichée de chiens.
Devant plusieurs hommes, je causai tout haut avec un moment d'une de leurs autres vies.
- Ainsi, j'ai aimé un porc.

Aucun des sophismes de la folie, - la folie qu'on enferme, - n'a été oublié par moi :
je pourrais les redire tous, je tiens le système.

Ma santé fut menacée. La terreur venait. Je tombais dans des sommeils de plusieurs jours,
et, levé, je continuais les rêves les plus tristes. J'étais mûr pour le trépas,
et par une route de dangers ma faiblesse me menait aux confins du monde et de la Cimmérie,
patrie de l'ombre et des tourbillons.

Je dus voyager, distraire les enchantements assemblés sur mon cerveau.
Sur la mer, que j'aimais comme si elle eût dû me laver d'une souillure,
je voyais se lever la croix consolatrice. J'avais été damné par l'arc-en-ciel.
Le Bonheur était ma fatalité, mon remords, mon ver : ma vie serait toujours trop immense
pour être dévouée à la force et à la beauté.

Le Bonheur ! Sa dent, douce à la mort, m'avertissait au chant du coq,
-
ad matutinum, au Christus venit, - dans les plus sombres villes :

O saisons, ô châteaux !
Quelle âme est sans défaut ?

J'ai fait la magique étude
Du bonheur, qu'aucun n'élude.

Salut à lui, chaque fois
Que chante le coq gaulois.

Ah! je n'aurais plus d'envie :
Il s'est chargé de ma vie.

Ce charme a pris âme et corps,
Et dispersé les efforts.

O saisons, ô châteaux !

L'heure de sa fuite, hélas !
sera l'heure du trépas

O saisons, ô châteaux !
__________

Cela s'est passé. Je sais aujourd'hui saluer la beauté.


Arthur Rimbaud (Une saison en enfer) 
 


    

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