Lundi 19 Septembre 2016 : Otur  > La Caridad   22 km

Etape 29 /38


    Sonnet LXXX

    Tu es enfin mienne. Repose-toi, ton rêve dans mon rêve. 
    Amour, douleur, travaux, doivent dormir maintenant. 
    La nuit tourne sur ses roues invisibles 
    et près de moi tu es pure comme l’ambre endormi. 

    Aucune autre, mon amour, ne dormira avec mes rêves.
    Tu iras, nous irons ensemble sur les eaux du temps.
    Aucune ne voyagera dans l’ombre avec moi, 
    rien que toi, toujours vivante, toujours soleil, toujours lune. 

    Déjà, tes mains ont ouvert les poings délicats 
    et ont laissé tomber de frêles signes sans but, 
    tes yeux se sont fermés comme deux ailes grises, 

    pendant que je suis l’eau qui te porte et me porte: 
    la nuit, le monde, le vent dévident leur destin, 
    et je ne suis plus sans toi mais seulement ton rêve.


    La Centaine d’Amour –
    Pablo Neruda

     


La solitude sert de cloison étanche entre l’homme et Dieu
Saint-Pol-Roux




 
Aube...moment d'éternité...je suis dans la grâce du Chemin...







                               

Les curiosités du Chemin...





Ah ! ces petits ponts qui enjambent les arroyos !...

   
La chouette veille...

  
Rencontre avec Danielle...

                          
Navia - Eglise et Saint-Roch



Le pont sur la Ria de Navia







                          

Luis le pèlerin espagnol de Séville                                      La Iglesia de
La Caridad           



La Playa de Pormenande


(Photo prise sur un site)


Pèlerine québecoise, australienne, couple allemand et Luis


Le dortoir


    Après le petit-déjeuner à l'hôtel, je prends le chemin un peu après 7h. Je marche pendant 2 km sur la

    carretera avant de rejoindre le chemin balisé. L'itinéraire est agréable et varié alternant de petites localités
    avec des forêts de pins et de châtaigniers qui offrent des sous-bois propices à la déclamation poétique !
    Depuis un mois que je marche, j'ai appris 8 nouveaux poèmes (Lorca, Neruda, Rimbaud, Baudelaire et
    René Char) et j'ai chaque matin déclamé pour en approfondir la mémorisation les 2 grands poèmes de

    Blaise Cendrars : "Le Panama ou les aventures de mes Sept Oncles" et "La Prose du Transsibérien et de
    la petite Jeanne de France"... (
    Voir ma page de Poèmes enregistrés)

    Il n'y a pas aujourd'hui de dénivelés importants, l'environnement est champêtre et je côtoie quelques
    fermes tapies au creux de collines arrondies...La Nationale 634 n'est pas loin, mais heureusement,
    le chemin s'en écarte suffisamment pour qu'on ne soit pas incommodé par la circulation...

    Une pèlerine me rattrappe et surprise, c'est Danielle de Metz que j'avais rencontrée l'année passée sur
    la Via de la Plata après Zamora et que j'avais retrouvée à Santiago pour partager le dernier dîner de
    ma pérégrination de 2015...Nous marchons ensemble jusqu'à Navia où je m'arrête pour acheter de
    l'eau et un Coca. Je continue seul l'étape. Après quelques kilomètres dans une campagne agricole
    constituée principalement de grandes étendues de maïs, je suis rattrappé par Luis, un jeune espagnol
    de Séville que j'ai croisé plusieurs fois les jours précédents. Nous finissons l'étape ensemble et nous
    nous installons dans l'Albergue où quelques lits sont déjà occupés.

    Après la douche, le lavage du linge et un temps de repos, je descends à une plage proche de cette
    localité, la Playa de Pormenande où je nage un bon moment dans une eau calme et profonde à 20°.

    Le soir dîner avec Danielle dans le centre-ville.
    Menu peregrino à 9 euros, vino tinto et orujo de hierbas compris !


 

La Playa de Pormenande où j'ai nagé
 

 


Hébergement à l'Albergue de Peregrinos de La Caridad

22 places
 (3 coquilles)
 



    La Poésie


    Et ce fut à cet âge...
    La poésie vint me chercher.
    Je ne sais pas, je ne sais d'où elle surgit,
    de l'hiver ou du fleuve.
    Je ne sais ni comment ni quand,
    non, ce n'étaient pas des voix,
    ce n'étaient pas des mots, ni le silence :
    d'une rue elle me hélait,
    des branches de la nuit,
    soudain parmi les autres,
    parmi des feux violents
    ou dans le retour solitaire,
    sans visage elle était là
    et me touchait.

    Je ne savais que dire,
    ma bouche ne savait pas nommer,
    mes yeux étaient aveugles,
    et quelque chose cognait dans mon âme,
    fièvre ou ailes perdues,
    je me formai seul peu à peu,
    déchiffrant cette brûlure,
    et j'écrivis la première ligne confuse,
    confuse, sans corps, pure ânerie,
    pur savoir de celui-là qui ne sait rien,
    et je vis tout à coup le ciel égrené et ouvert,
    des planètes,
    des plantations vibrantes,
    l'ombre perforée,
    criblée de flèches, de feu et de fleurs,
    la nuit qui roule et qui écrase, l'univers.

    Et moi, infime créature,
    grisé par le grand vide constellé,
    à l'instar, à l'image du mystère,
    je me sentis pure partie de l'abîme,
    je roulai avec les étoiles,
    mon coeur se dénoua dans le vent.

    Mémorial de l'île Noire  – Pablo Neruda
     

 

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