Samedi 25 Août 2012 : Limoges > Flavignac - 27,4 km

 


    Prière à l'inconnu

    Voilà que je me surprends à t'adresser la parole,
    Mon Dieu, moi qui ne sais encore si tu existes
    Et ne comprends pas la langue de tes églises chuchotantes.
    Je regarde les autels, la voûte de ta maison,
    Comme qui dit simplement: voilà du bois, de la pierre,
    Voilà des colonnes romanes.
    Il manque le nez à ce saint.
    Et au-dedans comme au-dehors, il y a la détresse humaine.
    Je baisse les yeux sans pouvoir m'agenouiller pendant la messe,
    Comme si je laissais passer l'orage au-dessus de ma tête.
    Et je ne puis m'empêcher de penser à autre chose.
    Hélas ! j'aurai passé ma vie à penser à autre chose.
    Cette autre chose, c'est encore moi.
    C'est peut-être mon vrai moi-même.
    C'est là que je me réfugie.
    C'est peut-être là que tu es.
    Je n'aurai jamais vécu que dans ces lointains attirants.
    Le moment présent est un cadeau dont je n'ai pas su profiter.
    Je n'en connais pas bien l'usage.
    Je le tourne dans tous les sens,
    Sans savoir faire marcher sa mécanique difficile.
    Mon Dieu, je ne crois pas en toi, je voudrais te parler tout de même.
    J'ai bien parlé aux étoiles, bien que je les sache sans vie,
    Aux plus humbles des animaux, quand je les savais sans réponse,
    Aux arbres qui, sans le vent, seraient muets comme la tombe.
    Je me suis parlé à moi-même, quand je ne sais pas bien si j'existe.
    Je ne sais si tu entends nos prières, à nous les hommes,
    Je ne sais si tu as envie de les écouter.
    Si tu as, comme nous, un coeur qui est toujours sur le qui-vive
    Et des oreilles ouvertes aux nouvelles les plus différentes
    Je ne sais pas si tu aimes à regarder par ici.
    Pourtant je voudrais te remettre en mémoire la planète terre
    Avec ses fleurs, ses cailloux, ses jardins et ses maisons
    Avec tous les autres et nous qui savons bien que nous souffrons.
    Je veux t'adresser sans tarder ces humbles paroles humaines
    Parce qu'il faut que chacun tente à présent tout l'impossible.
    Même si tu n'es qu'un souffle d'il y a des milliers d'années
    Une grande vitesse acquise
    Une durable mélancolie
    Qui ferait tourner encore les sphères dans leur mélodie
    Je voudrais, mon Dieu sans visage et peut-être sans espérance
    Attirer ton attention parmi tant de ciels vagabonde
    Sur les hommes qui n'ont pas de repos sur la planète.

    ...................
    (Suite en bas de page)

    Jules Supervielle
     




Après la sortie de Limoges, je suis heureux de retrouver les collines et les étangs...

       
et ces beaux massifs de fleurs


La
Vienne en arrivant à Aixe-sur-Vienne


Le pont d'Aixe-sur-Vienne


L'église Sainte-Croix d'Aixe-sur-Vienne





Le Château de la Judie, un peu avant d'arriver à Saint-Martin-le-Vieux

         
                                   La Croix du Bancharaud                                                    L'église de Saint-Martin-le-Vieux               


Un beau spécimen de taureau limousin


L'arrivée sur
Flavignac

     
                                                                                                       Le Refuge Pèlerin Municipal


L'église de l'Assomption de la Très Sainte Vierge de Flavignac


C'est bon d'arriver à l'étape, une bonne pinte t'attend, Denis !


Deux localités importantes au cours de cette étape :
Aixe-sur-Vienne où l'on peut voir de nombreuses niches abritant des Vierges,
madones encastrées dans les façades ou surmontant les portes d'entrée.
Saint-Martin-le-Vieux où l'on peut voir une fontaine à dévotions et une église
de style romano-gothique avec un portail encadré par deux arcs.
L'itinéraire nous fait traverser la Vienne puis suivre une petite route
le long de la
vallée de l'Aixette où l'on peut voir plusieurs moulins.
Ensuite alternance de petites routes et de carrefours qui nous font
cheminer à travers des coteaux verdoyants...
 



Je quitte seul le refuge. Comme je traverse les faubourgs de Limoges, le temps menace
et il commence à pleuvoir. Le temps de mettre mon équipement et la pluie s'arrête !
Beaucoup de goudron au cours de cette étape. Je m'arrête à Aixe-sur-Vienne où il y a
un marché. J'achète du fromage de chèvre et je m'arrête dans un bar boire un panaché.
Un peu plus loin je m'arrête devant l'église de Saint-Martin-le-Vieux pour rafraîchir
les pieds et manger un peu de fromage. La fin du parcours sans difficulté se fait
toujours sur de petites routes goudronnées.. J'arrive à Flavignac à 13h30. Une Dame que
j'avais appelée auparavant vient ouvrir le refuge où je suis rejoint un peu plus tard par Denis.
On achète à l'épicerie quelques provisions ainsi que de la bière et du vin pour le dîner
qu'on prend tous les deux dans le refuge.
 


Refuge Pèlerin Municipal "Voie de Vézelay"
9 Place Saint-Fortunat (Clés à la mairie)
Hébergement petit, mais bien situé et agréable)
2,5 coquilles

 


    Prière à l'inconnu (Suite et Fin)

    Ecoute-moi ! Cela presse. Ils vont tous se décourager
    Et l'on ne va plus reconnaître les jeunes parmi les âgés
    Chaque matin, ils se demandent si la tuerie va commencer.
    De tous côtés, l'on prépare de bizarres distributeurs de sang de plaintes et de larmes
    L'on se demande si les blés ne cachent pas déjà des fusils.
    Le temps serait-il passé où tu t'occupais des hommes ?
    T'appelle-t-on dans d'autres mondes, médecin en consultation,
    Ne sachant où donner de la tête
    Laissant mourir sa clientèle ?
    Ecoute-moi ! Je ne suis qu'un homme parmi tant d'autres.
    L'âme se plait dans notre corps,
    Ne demande pas à s'enfuir dans un éclatement de bombe.
    Elle est pour nous une caresse, une secrète flatterie.
    Laisse-nous respirer encore sans songer aux nouveaux poisons
    Laisse-nous regarder nos enfants sans penser tout le temps à la mort.
    Nous n'avons pas du tout le coeur aux batailles, aux généraux.
    Laisse-nous notre va-et-vient, comme un troupeau dans ses sonnailles,
    Une odeur de lait frais se mélant à l'odeur de l'herbe grasse.
    Ah ! si tu existes, mon Dieu, regarde de notre côté.
    Viens te délasser parmi nous.
    La terre est belle, avec ses arbres, ses fleuves et ses étangs,
    Si belle, que l'on dirait que tu la regrettes un peu
    Mon Dieu, ne va pas faire la sourde oreille
    Et ne va pas m'en vouloir si nous sommes à tu et à toi
    Si je te parle avec tant d'abrupte simplicité.
    Je croirais moins qu'en tout autre en un Dieu qui terrorise.
    Plus que par la foudre, tu sais t'exprimer par les brins d'herbe
    Et par les jeux des enfants et par les yeux des ruisseaux.
    Ce qui n'empêche pas les mers et les chaînes de montagnes.
    Tu ne peux pas m'en vouloir de dire ce que je pense
    De réfléchir comme je peux sur l'homme et sur son existence
    Avec la franchise de la terre et des diverses saisons
    Et peut-être de toi-même dont j'ignorerais les leçons
    Je ne suis pas sans excuses
    Veuille accepter mes pauvres ruses
    Tant de choses se préparent sournoisement contre nous
    Quoi que nous fassions, nous craignons d'être pris au dépourvu
    Et d'être comme le taureau
    Qui ne comprend pas ce qui se passe
    Le mène-t-on à l'abattoir
    Il ne sait où il va comme ça
    Et juste avant de recevoir le coup de mort sur le front
    Il se répète qu'il a faim et brouterait résolument
    Mais qu'est-ce qu'ils ont ce matin avec leurs tabliers pleins de sang
    A vouloir tous s'occuper de lui ?
     

     
    Jules Supervielle
     

 

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